automne2011

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mardi 11 août 2009

pourquoi le vampirisme séduit

Je dois bien avouer que j’avais depuis bien longtemps délaissé la littérature vampirique, depuis la fin de mon adolescence je dirais et surtout à cause de ma déception de certains tomes de la saga des vampires, sans doute parce que j’ai trop lu des livres d’un courant qui ne se renouvelle que peu pour me tourner vers les réalisations cinématographiques.. Est-il utile de préciser que je vous recommande tout de même ces lectures et visionnages? D’ailleurs, les couvertures sont à elles seules un piège à achat !
Biensur, on peut en avoir assez du phénomène, de ces vampires moumounes qui font passer les personnages de Karmina pour des figures mythiques du cinéma fantastique mondial, de ce couple Belle-Edward tellement peu charismatique qu’on en vienne à regretter les triangles amoureux tordus des Dames de Cœur, de ces maquillages blanchâtres de créatures de la nuit tellement bâclés qu’il est possible d’en voir la délimitation autour du visage, de ces gens dans le métro qui manquent leur station parce que la lecture du dernier tome de la série les absorbent à un point indécent, de ces ados vêtus de noir qui débarquent maintenant au collège le visage blême en se réclamant du monde des ténèbres : « T'as pas lu Twilight?! Tellllement wedge! »

Malgré tout, on ne peut que constater que tous les ingrédients des romans et films efficaces et savoureux sont présents.
Tout d’abord, un retour aux valeurs dans une société violente : les personnages sont à l'opposé de ce que l'on vit habituellement.Les personnages de ces livres sont emprunts de délicatesse, de courtoisie à l’image du comportement de gentleman d'Edward, toujours présent pour sauver sa belle , comme l’aurait fait un preux chevalier. Avec le thème de l'amour éternel romantique et dangereux inspiré des romanciers du XIXe siècle anglais Coleridge, Keats et Byron, les vampires ne manquent pas d'ingrédients envoûtants. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, cette figure première du vampire n'est pas effrayante et elle nous fait même rêver : beaux, immortels, toujours en bonne santé, comment ne pas envier ces dieux vivants mais maudits ? Pour s'en rendre compte, il suffit de regarder le vidéoclip "Heart Shaped Glasses" de Marilyn Manson ..
Contrairement aux zombies et autre morts-vivants qui sont des créatures décérébrées incapable de tenir une conversation, il est possible de converser avec un vampire pour nous faire de son expérience hors limites, « au carrefour des deux principaux instincts qui régissent notre existence, l'instinct sexuel et l'instinct de mort » comme le souligne Jean Marigny. C'est ce qui le rend si fascinant.
Si on en vient à rêver de tomber dans leurs bras et de leur offrir notre appétissante jugulaire, c'est que le vampire s'est transformé.
Non content de faire baver d'envie toutes les femmes aux prunelles en forme de cœur, les vampires côtoient maintenant les mortels. D'êtres maléfiques aux pouvoirs extraordinaires, ils s'humanisent. En leur donnant la parole, il devient possible de s'identifier à eux : ils ont montré que, comme les mortels que nous sommes, ils étaient capables d'aimer et de souffrir comme nous le montre Po-Chih Leong dans son film La Sagesse des crocodiles
Plus besoin d'aller au fin fond de la Transylvanie pour dénicher un vampire, il suffit de tourner la tête pour le voir plongé dans un devoir de math ou au coin d’une rue. Pour Jean Marigny, « ils ont perdu une grande part de leurs pouvoirs extraordinaires et ils sont plus proches de nous que leurs prédécesseurs. Rien ne s'oppose plus à ce qu'ils vivent parmi les mortels et qu'ils se fondent dans la population ».
De plus, les écrivains et autres producteurs savent rendre ces créatures très séduisantes. Le choix des acteurs en est la preuve : David Bowie ou Jude Law n'ont rien de très effrayants, bien au contraire. Le héros, c’est le vampire et plus, comme auparavant, les chasseurs de vampires.
Ce renversement pose une question essentielle à cette fascination dans une société obnubilée par la quête de l'éternelle jeunesse et par l'angoisse du temps qui passe : Et si le mode de vie actuel ne convenait pas ? Les œuvres vampiriques prônent la différence qui est non plus tolérée mais désirée.
La profondeur des sentiments est également abordée : le lecteur ou le cinéphile peuvent se plonger dans un monde où les protagonistes sont beaux, éternels et prennent le temps de construire des amours vraies et des amitiés solides, loin de la facilité des échanges via les téléphones portables et de la superficialité des contacts de chat, Facebook ou autres supports sans grand intérêt qui représentent juste un grand besoin de reconnaissance et finalement celui de se sentir exister aux yeux des autres, de l'Autre.
Enfin, peuvent vivre par procuration leurs aventures trépidantes.. dont la quête de l'Amour avec un grand A, celui dont l’homme est toujours en quête, comme de l'inaccessible étoile !
L'amour toujours l'amour ! Justement en s'humanisant, les vampires cèdent à la tentation tant sentimentale que physique.Les vampires sont captivants car, tout étant capable d'éprouver des sentiments sincères, ils touchent au surréalisme par leur perfection impossible aux humains tant dans la réflexion que physiquement. Ainsi, Steven Grlscz, le ténébreux séducteur ambidextre de La Sagesse des crocodiles doit se nourrir du sang de femmes éprises de lui pour survivre en raison de quelque obscure maladie. C’est un vampire moderne et urbain, victime de son organisme défaillant dont la quête le voue à l’insatisfaction et à la solitude. D’où le titre du film, emprunté à une citation de Francis Bacon qui nous apprend que le crocodile verse des larmes en dévorant sa proie. Dans ce film méconnu et pourtant fascinant, ce sont justement les funèbres palpitations amoureuses de son personnage qui intéressent Po-Chih Leong. Maudit, il doit boire le sang de jeunes femmes pour survivre et une fois rassasié, il sort de lui-même des sortes de cristaux qu’il collecte dans un joli cahier, comme autant de trace de ses amours. Steven, qui, lorsqu’il n’est pas en état de manque, sait se montrer doux et séduisant, fait la connaissance d’une nouvelle proie, Anne Levels. Anne tombe à son tour amoureuse, mais Steven lui-même est pris à son propre piège et s’interroge : se pourrait-il que l’amour sincère qu’il éprouve pour Anne puisse le sauver de son état de marginal ? Mais la nécessité de se nourrir se faisant sentir, il lutte en vain contre sa nature, qui finit par prendre le dessus. Sur le point de sacrifier Anne, il lui avoue d’abord son infortune, suscitant sa compassion, puis l’instinct de survie est le plus fort et il s’attaque à elle. Pour lui échapper, la jeune femme se jette du haut de la terrasse de son appartement. Steven la rattrape à l’ultime instant. En se débattant, Anne le griffe profondément. Affaibli et incapable de réagir, Steven finit par mourir en se vidant de son sang.
Un mythe s'est construit autour de la figure vampirique qui ne cessera de hanter les lecteurs ou spectateurs car dans le fond, derrière une belle histoire d'amour que se cache-t-il ? L'immortalité de cette histoire : vivre un Grand Amour sans fin, cela fait rêver les jeunes comme les moins jeunes..

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