automne2011

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vendredi 1 avril 2011

Pina Bausch : chorégraphe - danseuse

Pina Bausch passait son temps enfant sous les tables de l’hôtel -restaurant géré par ses parents à observer les gens, une activité qu'elle qualifie de « belle et captivante ». Elle commence sa formation de danse à 14 ans à la Folkwang-Hochschule d'Essen, berceau de la danse-théâtre, dirigée par Kurt Jooss. À 19 ans, elle s'envole pour les États-Unis étudier à la prestigieuse Juilliard School à New York et travaille comme soliste pour plusieurs chorégraphes américains, notamment Antony Tudor .


En 1961, elle est embauchée par le Metropolitan Opera de New York et rejoint le New American Ballet.En 1962, elle repart en Allemagne, rappelée par Jooss.


À partir de 1968, elle se met à la chorégraphie et prend la suite de Jooss en 1969. En 1972, elle rencontre Dominique Mercy aux États-Unis, et l'invite à rejoindre sa compagnie à Wuppertal en 1974, lui confiant alors les rôles principaux. Depuis, le centre artistique de la danse de Wuppertal porte son nom (Tanztheater Pina Bausch).


En 1976, lors d'une soirée consacrée à Bertolt Brecht et Kurt Weill (Die sieben Todsünden), Pina Bausch rompt définitivement avec les formes de danse conventionnelles en expérimentant de nouvelles formes de cet art. Elle introduit le concept de danse-théâtre ou Tanztheater sur la scène allemande et internationale, provoquant à ses débuts de nombreuses critiques. Contrairement à ses contemporains, Pina Bausch travaille non pas par rapport à des formes à reproduire, des pas bien définis, mais par rapport à l'anatomie du corps de chacun, aux possibilités qui sont données ou non aux corps. Elle interroge ses danseurs pendant tout le processus de création et creuse la vie de chacun, leur passé, pour les faire danser. Elle dénonce les codes de la séduction, la solitude dans le couple et travaille sur la communication dans les rapports hommes-femmes. C'est une vision très pessimiste qui s'exprime par des petits gestes anodins répétés, ou par l'accumulation des danseurs sur scène. Souvent, dans ses spectacles, une femme reste impassible et engage une rupture ou une transition vers une autre scène. Les « rondes à la Pina Baush » désignent ces petits gestes repris par les hommes ou les femmes ou les deux, une sorte de signature, même si elle les utilise moins en fin de carrière. Une autre marque est la fluidité qu'elle développe sur le haut du corps, induisant de grands mouvement de bras, la souplesse du buste, et des jeux récurrents avec les cheveux souvent très longs de ses danseuses. C'est un des exemples de langage ou de style par lesquels les chorégraphes ou les danseurs ont fait exister une autre danse. Ses spectacles mêlent la parole et le jeu d'acteur à la danse, c'est pourquoi Pina Baush a été très appréciée des gens de théâtre, peut-être avant ceux de la danse. La fluidité du haut du corps balloté entre en collision avec des changements de tonus. La danseuse reste imperturbable par rapport à ce qui se passe autour d'elle, elle suit sa ligne tracée. Les personnages se croisent, nos souvenirs personnels interfèrent et de la scène se dégage l'émotion intense de la solitude. En 1979, elle est invitée par Gérard Violette au Théâtre de la Ville à Paris qui dès lors sera une de ses scènes de prédilection, où elle a présenté plus de trente spectacles, dont de nombreuses créations.


Elle meurt le 30 juin 2009 à l'âge de 68 ans, cinq jours après avoir appris qu'elle souffrait d'un cancer généralisé.


La chorégraphe, qui avait toute sa vie refusé la captation vidéo de ses spectacles, n’a laissé que peu de témoignages visuels de son travail.Citons le film produit par François Duplat, de la reprise à l'Opéra national de Paris en 2008 de l'opéra dansé Orphée et Eurydice de Gluck.Son rôle d’aveugle dans Café Müller fut repris à deux reprises : l’un dans le film "E la nave va" ( 1982) de Federico Fellini dans lequel elle interprétait le rôle d'une princesse aveugle, l’autre en introduction du film "Parle avec elle" de Pedro Almodóvar (2001).On voit également à la fin, une scène du spectacle Masurca Fogo ! Peu de traces de ce travail de chorégraphies organisés le plus généralement sous forme de saynètes décrivant les émotions, notamment dans les rapports entre les hommes et les femmes, souvent teints d'érotisme léger , peu de traces de ce travail de recherche scénographique très élaboré qui privilégiait les détails et généralement particulièrement spectaculaire (montagne de fleurs, champs d'œillets, parois végétales, bateau, rochers massifs, rivières et cataractes d'eau...) pour une salle de spectacles hormis celui de la cinéaste Chantal Akerman qui a réalisé en 1983 le documentaire de 57 mns "Un jour Pina a demandé..." sur le travail de Pina Bausch. Rencontre entre la caméra et la danse, s'attachant aux moments de répétitions, à ceux des spectacles, aux témoignages des danseurs jusqu'à l'apparition de Pina Bausch, ce documentaire composé à partir d’impressions et de sensations très subjectives, est avant tout le témoignage de la première découverte de spectatrice marquée par "une émotion très forte proche du bonheur". Elle a suivi la chorégraphe et sa troupe de danseurs lors d'une tournée européenne en Allemagne, Italie et France .





































Tourné en 2008 à Wuppertal, "Les Rêves dansants" rend compte de la recréation de Kontakthof, une pièce de 1978, non pas avec les acteurs de sa troupe, mais avec des adolescents de la ville. Avec Jo Ann Endicott et Bénédicte Billiet, deux danseuses chargées de les former, ils sont les personnages principaux du film. Pina Bausch, elle, n'apparaît que dans quelques scènes, regroupées dans la dernière partie - qui sont aussi les ultimes scènes que le cinéma aura captées d'elle. Le film à mi-chemin entre une comédie musicale et un teen-movie montre les adolescents qui dansent, la manière dont les corps se dégourdissent, dont la maladresse s'efface, mais plus encore, les auteurs se concentrent sur leurs visages. Pour la chorégraphe, cette pièce était un laboratoire. En 1999, elle l'avait déjà remise sur le métier avec des acteurs de plus de 65 ans dont elle voulait qu'ils la façonnent et mêlent en quelques scènes clés, la mue du processus de connaissance de soi et leur expérience de la vie. C'est de cette matière que se nourrit la danse de Pina Bausch. "Kontakthof est un lieu où l'on se rencontre pour lier des contacts, affirmait Pina Bausch. Se montrer. Se défendre. Avec ses peurs. Avec ses ardeurs. Déceptions. Désespoirs. Premières expériences. Premières tentatives. De la tendresse, et de ce qu'elle peut faire naître." Pour la chorégraphe, cette pièce était un laboratoire. En 1999, elle l'avait déjà remise sur le métier avec des acteurs de plus de 65 ans dont elle voulait qu'ils la façonnent avec leur expérience de la vie. Avec les jeunes, une spirale harmonieuse, très émouvante, prend forme au fil des répétitions, dans laquelle se modifient conjointement la connaissance de soi et le rapport aux autres.Dix ans plus tard, c’est au tour de ces jeunes gens qui ont répondu sans bien savoir où ils mettaient les pieds à une annonce postée dans leur collège, de passer près d'une année ensemble à répéter la pièce, de découvrir que l'univers Pina Bausch va de pair avec une découverte d'eux-mêmes.


LE FILM

« Dansez, dansez, sinon nous sommes perdus ». Comme une injonction existentielle, évidente et nécessaire, Pina Bausch n’a cessé d’enjoindre ses danseurs à chercher, à exprimer, à vivre leur art. En se donnant à corps perdu.Ardent, organique et puissant. Le film hommage à Pina Bausch par un de ses amis, le réalisateur Wim Wenders est un plongée en 3D dans les œuvres majeures de la chorégraphe. Au plus près des mouvements, comme si on dansait avec les danseurs, tout près d’eux, qu’on ressentait leurs émotions, leur effort, leur grâce. C'est un film sensuel, sensoriel, où rien n’est analysé mais seulement dansé et vécu par des danseurs formidables, avec force et intensité. On y voit les scènes majeures de Kontakhof, Café Müller, Vollmond, le Sacre du Printemps.. On suit l’hommage des interprètes des œuvres, dans tous les âges de la vie, aux visages graves et profonds, souriants et émus quand ils racontent leurs souvenirs d’une vie passée à danser pour la grande Pina, les intermèdes poétiques, comme improvisés en pleine ville, en pleine nature qui m’ont rappelé les superbes images de The Ballerina Project. Et toujours ces robes de couleurs, mousseline fleurie, soie fanée qui viennent parer les corps arqués des danseuses.

Une grande émotion, plein les yeux et le cœur accroché !

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